La colère :
« Tout être humain a un jour été ou sera confronté à la
colère au cours de sa vie »
1 - Sans aller
jusqu'à parler de la délinquance, poussons la porte de la colère, celle à
laquelle tout être humain a un jour été ou sera confronté au cours de sa vie.
Le nourrisson lorsqu’il a faim l’exprime par des cris et des hurlements. Chez
l' enfant au comportement encore dicté par l’idée que les autres lui
doivent tout, elle est rapidement déclenchée par les caprices et les
frustrations. L’adolescence, période parfois difficile, empreinte de mal-être
et de révolte, se traverse avec des tempêtes. L’adulte quant à lui la manifeste
en fonction de sa personnalité, de son éducation, des exemples qu’il aura
reçus, des moyens qu’on lui aura inculqués dans l’enfance pour la gérer et la
canaliser. La colère de la personne âgée est souvent liée à la déception, à
l’abandon, à l’isolement, aux deuils successifs, à la peur de la mort… Sa
colère est souvent orientée vers elle-même et peut la faire basculer dans la
dépression.
Psychologiquement,
la colère est une émotion humaine comme la tristesse, la peur, la joie… Elle
serait donc normale. Le Dr Élisabeth Kübler-Ross, médecin- psychiatre, la
classe dans les cinq étapes nécessaires au travail de deuil. Au départ, il
s’agit d’un comportement impulsif, d’une réaction vive en réponse à une
situation blessante ou agaçante génératrice d’une souffrance. C’est également,
une attitude défensive provoquée par la peur devant un danger, la conséquence
d’un manque ou d’une surestime de soi, d’une absence ou d’un amour possessif… Bien
qu’inadaptée, elle s'utilise comme moyen de communication pour marquer une
opposition et pointer une injustice… La colère consciente ou inconsciente déclenche
une pulsion créatrice d’une énergie orientée vers les autres ou vers soi-même.
Elle produit une force agissante sur notre comportement et lui fait prendre une
direction. Elle détient le pouvoir de détruire ou de construire.
Saint
Augustin : « N’ayez point de dispute ou terminez-les au plus tôt —
Que la colère ne devienne pas de la haine »
« Elle se nourrit d’elle-même »
2 - Extériorisée, c’est-à-dire dirigée vers
l’autre, si l'orgueil la domine, elle est toujours nuisible.
Elle peut
devenir obsessionnelle. Elle se nourrit d’elle-même, se transforme en rancœur
et parfois en haine. Elle crée des fossés, empire la situation conflictuelle
d’origine et peut provoquer de la violence physique ou verbale. Contagieuse,
elle se communique à tel point que plus personne ne s’entend. En atrophiant la
raison, elle rend sourd et aveugle. Ici, c’est le guerrier, le combattant qui
entre en scène, celui qui ne doit pas montrer ses faiblesses et ne reconnait
pas ses torts.
3 - La colère
s’utilise également comme moyen de retranchement stratégique, elle évite des
remises en question et va jusqu’à culpabiliser l’autre pour un comportement
dont nous sommes seuls responsables. « D’après l’idée très fausse
qu’on ne peut pas réformer sa propre nature, l’homme se croit dispensé de faire
des efforts pour se corriger des défauts dans lesquels il se complaît
volontiers, ou qui exigeraient trop de persévérance ; c’est par exemple
que l’homme enclin à la colère s’excuse presque toujours sur son tempérament ;
plutôt que de s’avouer coupable, il rejette la faute sur son organisation,
accusant ainsi Dieu de ses propres méfaits. C’est encore une suite de l’orgueil
que l’on trouve mêlé à toutes ses imperfections ». (Allan Kardec,
« L’Évangile selon le Spiritisme » chapitre IX, paragraphe 10.)
4 - Lorsqu’elle
est intériorisée, dirigée vers nous-mêmes, elle sait se montrer autodestructrice
et nous plonger dans une profonde dépression pouvant conduire au suicide. Cette
émotion intelligemment canalisée devient une émotion saine et une force
positive utile pour surmonter des difficultés, des tristesses ou transformer
des faiblesses. La colère, peut-être une source de motivation créatrice et
constructrice.
Saint Augustin a dit : « L’espérance
a deux beaux enfants : la colère et le courage. La colère, face aux choses
telles qu’elles sont, et le courage pour les changer. »
Voici quelques « saintes
colères » qui furent constructrices et créatrices :
La colère de mère Térésa, prix Nobel de la paix en
1979, elle passa sa vie dans les bidonvilles de Calcutta : « Quand je vois le gaspillage, je suis
en colère à l’intérieur, je ne me réjouis pas d’être en colère. Mais c’est un
sentiment que je ne peux contrôler après avoir vu l’Éthiopie ». Washington 1984.
Le
célèbre cri de colère de l’abbé Pierre, fondateur d’Emmaüs qu’il a poussé
contre la pauvreté et la détresse humaine :
« il n’y
a pas de violence qu’avec les armes, il y a des situations de violence où il
n’y a plus aucun espoir. »
Le Christ a lui aussi exprimé un sentiment
ressemblant à la colère.
« La Pâque des Juifs était proche, et
Jésus monta à Jérusalem. Il trouva dans le temple les vendeurs
de bœufs, de brebis et de pigeons, et les changeurs assis. Ayant
fait un fouet avec des cordes, il les chassa tous du temple, ainsi que les
brebis et les bœufs ; il dispersa la monnaie des changeurs, et renversa
les tables ; et il dit aux vendeurs de pigeons : Otez
cela d’ici, ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ».
(Jean 2:13-16.)
« Dans ces situations,
la réaction est dirigée par l’amour, le devoir, la raison, le respect et les
valeurs morales. »
5 - Si la colère reste une émotion
« normale », la façon dont elle sera traitée ne l’est pas toujours. Voyons
ces exemples :
Lorsqu’on constate que le comportement
d’un adulte ou d’un enfant est inadapté ou dangereux pour lui-même ou pour
autrui, la colère est sensée et réfléchie.
Si par mauvaise influence ou par choix,
une personne emprunte une direction préjudiciable pour elle-même, la colère
peut se justifier.
Dans ces situations, la réaction est
dirigée par l’amour, le devoir, la raison, le respect et les valeurs morales.
« Si la colère génère de l’agressivité verbale ou physique,
elle cherche à nous faire prendre le contrôle de l’autre, le dominer et le
blesser. »
6 - Elle reste inacceptable si elle est
commandée par l’orgueil qui […] vous
porte à vous croire plus que vous n’êtes ; à ne pouvoir souffrir une
comparaison qui puisse vous rabaisser ; à vous voir, au contraire,
tellement au-dessus de vos frères, soit comme esprit, soit comme position
sociale, soit même comme avantages personnels que le moindre parallèle vous
irrite et vous froisse ; et qu’advient-il alors ? c’est que vous vous
livrez à la colère.
Cherchez l’origine de ces accès de démence
passagère qui vous assimilent à la brute en vous faisant perdre le sang-froid
et la raison ; cherchez, et vous trouverez presque toujours pour base l’orgueil
froissé. N’est-ce pas l’orgueil froissé par une contradiction qui vous fait
rejeter les observations justes, qui vous fait repousser avec colère les plus
sages conseils ? Les impatiences mêmes que causent des contrariétés souvent
puériles tiennent à l’importance que l’on attache à sa
personnalité devant laquelle on croit que tout doit plier.
[…] (Allan Kardec, « Évangile
selon le Spiritisme » chapitre 10 – paragraphe 9.)
Si la colère génère de l’agressivité
verbale ou physique, elle cherche à nous faire prendre le contrôle de l’autre,
le dominer et le blesser. Peu importe la raison pour laquelle elle a éclaté,
ici, elle est injustifiable. Son but, détruire la personne. Elle produit une
énergie négative et ferme la porte aux différentes formes de communication et
au dialogue. Ses phrases et les insultes sont violentes.
[…]Mais, moi, je vous dis que quiconque se
mettra en colère contre son frère méritera d’être condamné par le jugement ;
[…] (Allan Kardec, « Évangile
selon le Spiritisme », chapitre IX – paragraphe 3.)
[…]Par ces maximes, Jésus fait une loi de la
douceur, de la modération, de la mansuétude, de l’affabilité et de la
patience ; il condamne par conséquent la violence, la colère, et même
toute expression désobligeante à l’égard de ses semblables […].
[…]Il est évident qu’ici, comme en toute
circonstance, l’intention aggrave ou atténue la faute ; mais en quoi une
simple parole peut-elle avoir assez de gravité pour mériter une réprobation si
sévère ? C’est que toute parole offensante est l’expression d’un sentiment
contraire à la loi d’amour et de charité qui doit régler les rapports des
hommes et maintenir entre eux la concorde et l’union ; que c’est une
atteinte portée à la bienveillance réciproque et à la fraternité ; qu’elle
entretient la haine et l’animosité ; enfin qu’après l’humilité envers
Dieu, la charité envers le prochain est la première loi de tout chrétien […] (Allan
Kardec, « L'Évangile selon le Spiritisme », chapitre IX – paragraphe 4.
La colère chez
l’adolescent :
7 - Nous avons vu qu’elle se manifeste à
toutes les étapes du développement humain principalement à la période de
l’adolescence qui est reconnue pour être une étape naturellement propice aux
colères. Ce n’est pourtant pas l’unique réponse à apporter aux débordements et
à l’impulsivité juvénile.
- Des parents surprotecteurs ou trop exigeants interdisant l’échec peuvent être étouffants. Ils ne permettent pas à l'adolescent de faire des choix, de prendre des décisions et cela même si celles-ci concernent sa vie; le jeune n’a pas la possibilité de se construire et de s’épanouir. Pour l’enfant, il y a un manque de reconnaissance et une perte de l’estime de soi.
Parole
d’ado : « On se sent agressé, même si
les gens n’ont pas de mauvaises intentions ».
- Des parents absents ou démissionnaires pour l’enfant; il y a une perte de confiance en l’autorité.
Parole
d’ado : « J’ai
appris à me défendre et à me débrouiller seul. Cela est devenu une spirale, une
surenchère “.
- L’ennui et le manque de sens à sa vie amène à la dévalorisation.
Parole d’ado : ‘Tu vois
tout en noir, tu ne penses à rien. Cela arrivait quand je n’avais rien d’autre
à faire.’
- Une mauvaise influence de ses pairs ou des mauvaises rencontres peuvent déclencher des accès de colère.
- La colère, si elle est un moyen de communication instauré par la famille peut créer, pour le jeune, des difficultés à s’exprimer calmement avec des mots, à reconnaitre et à gérer ses émotions. Il communique par des cris et des gestes inappropriés.
- Le caractère de l’esprit va se dévoiler dans la préadolescence.
[…]Sans contredit, il est des tempéraments qui se prêtent plus que
d’autres aux actes violents […]
[…] Ne croyez pas que là soit la cause première de la colère, et soyez
persuadés qu’un Esprit pacifique, fut-il dans un corps bilieux, sera toujours
pacifique ; et qu’un Esprit violent, dans un corps lymphatique, n’en sera
pas plus doux ; seulement, la violence prendra un autre caractère ; n’ayant
pas un organisme propre à seconder sa violence, la colère sera concentrée, et
dans l’autre cas elle sera expansive. […]
[…]Le corps ne donne pas plus la colère à
celui qui ne l’a pas, qu’il ne donne les autres vices ; toutes les vertus
et tous les vices sont inhérents à l’Esprit ; […] (Allan
Kardec, ‘L’Évangile selon le Spiritisme’, chapitre IX — paragraphe 10.)
« La colère procure la satisfaction immédiate d’avoir
évacué quelque chose. »
8 - Derrière toutes ces raisons et celles
qui ne sont pas décrites ici, on constate que la colère peut cacher une énorme
souffrance, une fragilité émotionnelle et qu’elle devient quelquefois le seul
moyen trouvé pour exprimer quelque chose à l’autre. Pourtant, en famille ou à
l’extérieur, elle n’est pas la solution à adopter pour s’exprimer, c’est un
moyen stratégique inefficace qui risque d’amplifier le problème d’origine. Elle
est communicative, le ton monte, les personnes ne s’entendent plus, les portes
se claquent. La violence est telle que la personne s’en prendra aux objets
personnels qu’elle aura sous la main (ex : téléphone portable, vêtements,
miroirs…)
[…] Dans sa frénésie, l’homme colère s’en
prend à tout, à la nature brute, aux objets inanimés qu’il brise, parce qu’ils
ne lui obéissent pas. Ah ! Si dans ces moments-là, il pouvait se voir de
sang-froid, il aurait peur de lui, ou se trouverait bien ridicule ! Qu’il
juge par là de l’impression qu’il doit produire sur les autres. Quand ce ne
serait que par respect pour lui-même, il devrait s’efforcer de vaincre un
penchant qui fait de lui un objet de pitié. […] Un esprit protecteur.
Bordeaux, 1863 (Allan Kardec, ‘L’Évangile selon le Spiritisme’,
chapitre IX — paragraphe 9.)
La colère procure la satisfaction
immédiate d’avoir évacué quelque chose. Celui qui s’est emporté la trouve
légitime. Rapidement, cette légitimité, si elle n’est pas trop nourrit par
l’orgueil, va disparaître. En prenant conscience de ce qui vient de se passer,
les regrets arrivent. Un profond sentiment de tristesse envahit l’être tout
entier. N’a-t-on pas à ce moment-là un besoin de réparer, l’envie de rembobiner
la scène ? La colère ne fait pas mal qu’aux autres, à ceux que l’on aime
et qui nous aiment. Une fois passée, elle nous touchera également et fera
naître en nous les sentiments de tristesse et de culpabilité. Et si le remède à
tout cela se trouvait dans une demande de pardon ?
Voici une des phrases, que mère Térésa a
transmise, aux jeunes :
‘Si la colère est pour toi une faiblesse et non une preuve de
force ; alors la paix viendra’.
9 - Quel que soit notre âge, nous sommes
plus ou moins concernés par la colère. Plutôt que de se laisser dominer par
elle, essayons de prendre conscience de ce que nous ressentons à ce moment-là,
nos émotions, nos sentiments, nos impressions, la perte d’énergie qu’elle
occasionne, la fatigue… […]Il
n’est pas de progrès possible sans une observation attentive de soi-même. Il
faut surveiller tous nos actes impulsifs, afin d’arriver à savoir dans quel
sens nous devons porter nos efforts pour nous améliorer. […]
(Léon Denis, ‘Le problème de l’être et
de la destinée’, chapitre XXIV- page 172.)
Vous
constaterez qu’en plus de faire mal, elle ne règle rien. La laisser passer et
non pas la laisser nous dominer. Parler, exprimer ce que l’on ressent, ce qui
nous a dérangé et ne pas laisser les choses s’accumuler.
[…] S’il songeait que la colère ne remédie à
rien, qu’elle altère sa santé, compromet même sa vie, il verrait qu’il en est
la première victime ; mais une autre considération devrait surtout l’arrêter,
c’est la pensée qu’il rend malheureux tous ceux qui l’entourent ; s’il a
du cœur, n’est-ce pas un remords pour lui de faire souffrir les êtres qu’il
aime le plus ? Et quel regret mortel si, dans un accès d’emportement, il
commettait un acte qu’il eût à se reprocher toute sa vie ![…] Un esprit protecteur.
Bordeaux, 1863. (Allan Kardec, ‘Évangile selon le Spiritisme’,
chapitre IX — paragraphe 9.)
Conclusion :
10 -
[…] En somme, la colère n’exclut pas
certaines qualités du cœur ; mais elle empêche de faire beaucoup de bien,
et peut faire beaucoup de mal ; cela doit suffire pour exciter à faire des
efforts pour la dominer. […] Un esprit
protecteur. Bordeaux, 1863 (Allan
Kardec ‘Évangile selon le Spiritisme’ chapitre IX.)
Si la colère est une force, essayons de
l’employer de façon positive. Utilisons l’énergie qu’elle soulève pour
améliorer notre monde, créer un avenir meilleur. La manière dont nous allons la
gérer et l’utiliser suscitera le courage et la volonté pour construire, ou l’aveuglement
et la violence pour le détruire.
[…]Enfin,
il faut savoir supporter toutes choses avec patience et sérénité. Quels que
soient les agissements de nos semblables envers, nous, nous ne devons en
concevoir aucune animosité, aucun ressentiment ; mais, au contraire, faire
servir toutes les causes d’ennui ou d’affliction à notre propre éducation
morale. […]
[…] Le bonheur n’est pas dans les choses extérieures
ou les hasards du dehors, mais seulement en nous-mêmes, dans la vie intérieure
que nous savons nous faire. […] (Léon
Denis « Les problèmes de l’être et de la destinée » XXIV.
« Colère et intolérance
sont les ennemis d’une bonne compréhension. » Gandhi, icône de la
non-violence.
Mauricette Ruchot
1 – Qu’est-ce que la colère ? Comment se manifeste-t-elle ? Pourquoi,
nous mettons-nous en colère ? 2 – Est-ce un comportement positif ? Développez
votre réponse. 3 – Nous aide-t-elle dans notre progression spirituelle et dans
notre vie ? Développez votre réponse. 4 – Comment peut-elle être acceptable
voir positive ? Nommez une sainte colère. 5 – Est-il parfois normal de se
mettre en colère ? Donnez des exemples ? 6 – Quand est-elle inacceptable ? 7 –
Question pour les adultes : qu’est-ce qui peut provoquer la colère chez un
adolescent ? Question pour l’adolescent – Qu’est-ce qui déclenche votre colère
? 8 – Que procure-t-elle et que cache-t-elle ? Expliquez ce que vous ressentez
après votre colère. 9 – Comment réagir avec elle ? 10 – A-t-elle apporté une
solution ? Notez ce que vous devriez changer pour que votre colère soit utile.
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